http://www.geocities.com/Athens/Acropolis/1920/tantra.htmlLe Vajrayana ou la voie des TantrasCe texte est extrait du livre « Padmasambhava, La magie de l’Éveil » de Philippe Cornu, publié aux Éditions du Seuil, Collection Points Sagesses. Philippe Cornu étudie le bouddhisme depuis plus de quinze années sous la direction de maîtres tibétains nyingmapas dont Sogyal Rinpoché.
C’est cette dernière voie qui caractérise le plus le bouddhisme tibétain aux yeux du monde. C’est peut-être parce que qu’elle est la plus spectaculaire. La voie de la Transformation des Tantras préconise en effet l’emploi d’une multitude de méthodes
méditatives et yogiques qui, mal comprise, ont souvent nourri les fantasmes ou l’indignation de voyageurs occidentaux peu enclins à accepter une spiritualité si riche en symboles et si haute en couleur.
En réalité, le Vajrayâna s’inscrit dans le cadre bouddhique et philosophique du Mahâyâna et nécessite une bonne compréhension de la compassion et de la vacuité, [i]shunyata. Dans le Mahâyâna, les praticants, en plus du voeu de libération individuelle, font celui d’aider autrui sur le chemin de l’Éveil. C’est le voeu de bodhicitta, la Pensée de l’Éveil, que l’on cultive dans toutes les activités dirigées vers le bien d’autrui. Cet idéal de héros de la compassion fait du praticant un boddhisattva, un « Héros de l’Éveil ». Cet engagement fondamental est indispensable pour accéder au Vajrayana.[/i]
La bodhicitta absolue ou la double vacuité
D’autre part, il convient de réaliser la bodhicitta absolue, qui consiste en la double vacuité, celle du « soi » et celle des phénomènes extérieurs. « Vacuité » n’est en aucun cas synonyme de de néant. Il s’agit de la réalité absolue de tous les phénomènes : n’existant qu’en dépendance les uns des autres, les phénomènes sont dépourvus d’existence autonome. Ils apparaissent cependant, mais leur apparence n’a qu’une réalité relative. Cette dernière réalité, appelée vérité conventionnelle ou développement est un piège pour l’ignorant qui prend ce qui perçoit par les sens pour l’unique vérité. Une telle croyance le plonge dans l’illusion qui engendre à son tour karma et souffrance.
En fait, les réalités absolues et relative des phénomènes sont indissociables comme les deux faces d’une pièce de monnaie. La philosophie de la vacuité n’est ni nihiliste, puisqu’elle
admet la vérité relative des phénomènes, ni éternaliste puisque, selon elle, rien de réel n’a jamais été crée ni ne sera vraiment détruit.
Cette vision débouche en vérité sur une ouverture spirituelle infinie et sur la compassion sans références, prémices indispensables à la compréhension du tantrisme.
Tandis que les voies des sûtras prônent le renoncement aux passions obscurcissantes pour maîtriser l’esprit et parvenir à la libération, les véhicules des tantras préconisent au contraire, pour ceux qui ont la capacité et la maturité nécessaires, l’utilisation de tout le potentiel des passions. Si l’on reconnaît qu’en leur nature profonde les agrégats du « moi », les passions et les émotions sont des qualités de la Nature de Bouddha, il est possible de les purifier ou de les transformer en sagesse par divers « moyens habiles ». C’est la voie qui transforme les poisons en remèdes ou catalyseurs.
Sens de VajraLe vajra, ou sceptre-diamant, symbolise le principe de la transformation. Les cinq branches du bas représentent les cinq agrégats grossiers du « moi » ou les cinq émotions négatives,
ignorance, colère, orgueil, désir et jalousie. Les cinq branches du haut symbolisent les cinq Bouddhas ou les cinq Sagesses résultant de la transformation des passions.
Au milieu, la sphère de la vacuité est la clé de la transmutation.
Le chemin de l’ÉveilPour atteindre l’au-delà de la souffrance ou nivâna il n’est plus nécessaire de rejeter le
samsâra, le « cercle vicieux » de notre existence conditionnée. L’idée est de transmuter les perceptions impures en pures visions. Le samsâra n’est jamais que notre perception karmique impure, elle-même le fruit de nos conditionnements et de notre ignorance.
Il y a en fait indivisibilité du samsâra et du nirvâna.
Loin d’être de simples tecniques, les moyens habiles sont nés de la pure sagesse des Bouddhas. Très variées, ils comprennent entre autre la visualisation de déité de pratique, ou
Yidam, la récitation de
mantras, formules qui condensent l’essence des déités en sons, l'exécution de gestes symboliques ou
mudrâ, des rituels complexes, l’élaboration de
mandalas, l’utilisation d’objets rituels et des danses sacrées.
Les déité
Yidam ne sont pas des dieux extérieurs mais des archétypes de l’Éveil, des
Bouddhas répartis en cinq classes ou familles selon leurs qualités respectives. (Les familles
Tathâgata ou Bouddha,
Vajra ou Diamant,
Ratna ou Joyaux,
Padma ou Lotus et
Karma ou Action).
L’importance du maître spirituel
L’aspirant au Vajrayâna doit d’abord rencontrer un maître qualifié auquel il offre toute sa confiance et sa dévotion. Celui-ci lui accorde la transmission de pouvoir, ou [i]wang, et les instructions qui lui permettrons de pratiquer un
sâdhana, ou « moyen d’accomplissement ». Ce sâdhana consistera principalement à visualiser la déité, ou
Yidam, et à réciter son mantra, ce qui est un puissant moyen de transformation des caractéristiques émotionnelles ordinaires en sagesse. Quand le yogi réalise enfin que sa vraie nature n’est pas différente de celle de la déité, il atteint la libération.
Ce chemin nécessite l’absence de doutes, la pureté de vision et surtout un lien sacré, ou samaya, parfait avec le maître. Incarnation vivante de la transmission des Bouddhas, détenteur de la Sagesse de toute la lignée des maîtres qui l’ont précédé, le maître ou
lama, est effectivement très important. Mais cette insistance n’est pas une manie tibétaine, elle
reflète l’essence même du Vajrayana. N’est-il pas dit que tous les Bouddhas du passé, du présent et du futur ont atteint et atteindront l’Éveil en prenant appui sur un maître spirituel ?
Guru Rinpoché accompagné des maîtres nyingmapas